Entretien avec Caroline Bénichou

« À la galerie VU’, on vient voir des tirages, pas seulement des images »

Pourquoi dit-on que la galerie VU’ propose une photographie proche de la matière ?
VU’ est une galerie où l’on porte une attention particulière aux tirages des photographes que nous exposons et représentons et à la manière dont les photographes envisagent et conçoivent ces tirages, toujours en cohérence avec leur travail photographique.

Les collectionneurs sont-ils sensibles à cette matérialité ?
Absolument. Le tirage en tant qu’objet est primordial. L’intervention du photographe, la qualité du rendu, le soin apporté à chaque étape… tout cela est décisif. La matérialité de la photographie joue un rôle essentiel dans son appréciation, surtout lorsqu’un œil expert se pose sur elle. Chez VU’, on vient voir des tirages, et non des images.

Je le répète souvent : aller voir une exposition est fondamental. On y découvre la photographie autrement que sur un écran d’ordinateur ou de téléphone.

Pouvez-vous nous donner quelques exemples ?
Je pense à Ouka Leele, exposée en ce moment dans L’Épreuve du réel, Chapitre I (NDLR : l’exposition est visible jusqu’au 18 octobre). L’image de l’affiche de l’expo et le tirage présenté en galerie sont incomparables ! Le papier Kodak choisi, très brillant et vibrant, répond à la dynamique et au travail fou des couleurs d’Ouka Leele.

Il y a aussi Juanan Requena, Juan Manuel Castro Prieto, Israel Ariño ou encore Marina Black, chacun avec une approche technique singulière ?
Prenons Marina Black : cette photographe russe installée au Canada croise techniques anciennes – comme le collodion humide – et procédés contemporains, notamment le tirage numérique sur papiers coréens artisanaux.

Juan Manuel Castro Prieto, lui, est un des plus grands tireurs européens. Il continue d’ailleurs à travailler pour quelques grands photographes en Espagne tout en menant sa propre carrière. Ses expérimentations, comme ses tirages virés à l’or, rencontrent beaucoup de succès.

Je pense aussi à Pablo Guidali, qui a récemment présenté une série de tirages au palladium. Il s’agit de tirages sous agrandisseur réalisés avec des sels de palladium, une technique délicate qui offre des noirs denses et veloutés, une profondeur unique et une matérialité sublimée par le choix de papiers de création.

Est-ce la matière qui fait naître l’émotion face à une photographie ?
Oui, la matière y participe pleinement. Elle crée une dimension sensuelle, à la fois par le regard et par la dimension tactile. Le tirage donne corps à la photographie : c’est l’idée qui se matérialise.

Mais attention : chez VU’, il est formellement interdit de toucher les tirages… sous peine de se faire rappeler à l’ordre par la galeriste ! (rires)

Nous voilà prévenus ! Merci pour cet échange passionnant, Caroline Bénichou.

Les nouveaux horaires et jours d’ouverture de la galerie VU’
au 60 avenue de Saxe, Paris 15ème : du jeudi au samedi, de 14h à 18h.